ZOOM – Paulette Lalère, résistante : « Il faut parler, car parfois la vérité est transformée »
11 juin 2024
Quatre-vingts ans plus tard, dans le rétroviseur du temps, Paulette Lalère évoque les années sombres, le débarquement, son époux Louis, soldat et marin qui participe au débarquement en Normandie. Une histoire de vies. Rencontre avec l’histoire.
Nous sommes le 6 juin 2024, que souhaitez-vous transmettre à nos lecteurs ?
Surtout ce que nous avons vécu pendant cette guerre de 1939 )à 1945.
Dès le discours du Général de Gaulle, le 18 juin 1940, mon papa, Georges Paul et moi avons contribué à la résistance. À cette époque, j’avais à peine 16 ans. À Gagny, où nous habitions, la Libération fut au mois d’août. Néanmoins, le 6 juin 1944, nous étions heureux car nous savions, par les réseaux de résistance que les alliés avaient débarqué.
Dans votre livre (La vie pour chemin aux éditions Chum) vous expliquez que votre père a toujours refusé les décorations. Pour quelle raison ?
Je vais être franche, à l’époque, certains décorés ont été des collaborateurs ou totalement passifs. Certains n’avaient aucun lien dans les réseaux de résistance. Mon papa disait toujours : « Je me suis battu pour la France, pas pour des décorations ». Il fut décoré à Verdun de la croix de guerre (1914-1918) et de la médaille militaire, qui est une très haute distinction.
Vous avez sacrifié avec votre mari Louis Lalère, votre jeunesse à la France, quel regard portez-vous sur notre pays ?
J’ai peur qu’une nouvelle guerre éclate en Europe. J’ai peur pour mes enfants, mes petits enfants. Ce qui me désole c’est le manque d’intérêt de certains pour l’histoire de notre pays.
Que pouvez-vous nous dire sur votre famille aujourd’hui ?
En 2024, j’ai 26 petits enfants, 35 arrière-petits-enfants et une arrière-petite-fille. Mon époux est décédé le 11 octobre 2000, peu avant ses 80 ans. Par amour, car c’était ma promesse, j’ai sauté en 2007, à 80 ans en parachute sur les plages de Normandie. Le 8 juin 2014, j’ai sauté à nouveau sur Port en Bassin. Louis Lalère, mon futur mari, alors fusillé marin, y a débarqué le 6 juin. En 1965, nous nous sommes installés en Vendée, à Saint-Jean-de-Beugné, mon mari était fatigué et souhaitait retourner dans ses terres de cœur.
Votre père et votre famille ont traversé un siècle de conflits, aujourd’hui en ce 6 juin 2024, avez-vous une remarque ?
Je vois à la télévision, des images d’Ukraine qui me terrifient. Elles me rappellent la guerre, quand j’étais jeune. Il faut parler, car parfois la vérité est transformée.
Extrait du Journal Ouest-France du 6 juin 2024.
Crédit photo : Ouest-France.